le cahier blanc
Aurélien Delsaux
aujourd'hui ou hier soir dieu est mort et tout le monde s'en fout
ils marchent dans la parole piétinant trébuchant jusqu'à ce qu'ils la mangent jusqu'à ce qu'ils se reconnaissent hommes
-être vivant avant de mourir
C'est quand dans la croissance du péril croît aussi l'indifférence au péril, que l'homme s'affadit, s'abêtit - redevient sanglier. Plus de résistance contre l'invasion de troupeaux de porcs en l'âme. Laide métamorphose. Comme je peine à la décrire. Un...
il est temps qu'il vienne le joyeux bordel
la révolution dont le monde a besoin sera sensible ou ne sera pas
quand vient le soir sous les tilleuls dont les parfums font des coeurs ce qu'ils veulent quand l'hirondelle au ciel de juin mord au merisier le dernier fruit - mon coeur est plein et la nuit vient et la nuit vient
PRENEZ-VOUS LA TÊTE AVANT QU'ON VOUS LA PRENNE
faut être juste sous la bonne branche pour voir le ventre blanc de l'écureuil
vous n'êtes pas obligé de fixer l'objectif vous pouvez regarder ailleurs loin loin le fleuve si vous voulez ou le ciel
je regardais par la vitre du trainquelque chose des mots venaient dans ma tête un flotla mer arrêt en garedes wagons abandonnés le poème s’en est allé
Cannes-Toulon 2 nous bavardionsnous nous regardions parlantmaischaque fois que la mer apparaissaitnous tournions tous les trois ensemble la têteet nous nous taisions jusqu’à ce que quelque chose à nouveaucache la mer et brisel’émerveillement
j’ai payé mes maladressessur ton dos d’une caressesur ta fesse d’un baiser pour payer tes mauvais joursla braise d’un mot d’amouret je ne suis plus lésé
si des miens comme Ulysse un très long voyageme sépare longtemps longtemps si comme Ulysseun jour béni les dieux permettent le retourqu’ils fassent qu’aussi je puisse être reconnu de ma femme aux racines vivantes du lit d’olivierde mon pèreaux noms de...
racontant l’histoire aux enfants il faut trouver la phrase assez fine et légère pour que soient doucement forés leurs cœurs nouveaux moi j’ai beaucoup regardé l’eau qui connaît toute forme qui sait la bonté au lac tranquille un bon été que tout se baigne...
la misère / l’impatience pour qu’en vérité tout bascule pour que la pesanteur nous sauve pour que l’ordre oublie l’apparence pour que l’équilibre enfin craque du bon côté j’ai déposé sur le plateau de ma balance mieux qu’un poème une pivoine
à ceux qui voudraient nous empêcher de parler en premier du printemps prétextant la lutte et tous les cris qu’il faut ici pousser pour survivre à ceux qui prendraient nos poèmes pour mauvais opium et pavot blet nous dédions déjà le dernier chant du dernier...
poètes dans la ville serviteurs inutiles coquelicots dans les blés
chaque vague nous lavant le visage nous nageons contre la marée montante jusque vers l'île sans supermarché ni faux dieux ni voiture où cependant nous serons heureux
ne t'habitue pas arme-toi par le poème et par l'histoire par l'idée l'ami le silence ce monde attend sa guérison
Je pense aux aurochs et aux anges, au secret des pigments immuables, aux sonnets prophétiques, au refuge de l’art. Vladimir NABOKOV, Lolita, 1955, traduction de Maurice Couturier
tôt ce matin la pluie m’adoube: tout l’aujourd’hui tu deviendras le chevalier qui ne fait rien