une voix à travers nos voix
une voix chantante au cœur de nos voix qui parlent
plus que parole et moins que souffle
quelqu’un d'autre est là
poète de tout
musique
le cahier blanc
Aurélien Delsaux
une voix à travers nos voix
une voix chantante au cœur de nos voix qui parlent
plus que parole et moins que souffle
quelqu’un d'autre est là
poète de tout
musique
j’attendais
j’ai jeté des cailloux
dans la mare aux grenouilles
– que vienne une réponse
j’ai jeté ma bouche
à la bouche des filles
– que vienne une réponse
j’ai jeté l'aïeul
au fond d’un lit de gouffre
– que vienne une réponse
j’ai jeté mon foutre
dans la nuit de ma femme
– que vienne une réponse
j’ai jeté de mes amis
les cendres froides au vent
– que vienne une réponse
et
neuve poignée de foin au feu
dans le poème rejetant
mes simples énigmes
enfin crépite
la solution des flammes:
sur la petite mare
navigation de tous les astres
pour chaque baiser
mon achèvement élargi
cœur des cercles
cœur des ondes
l’amour fixe
et voie lactée
sillon des heures sperme du temps
et cendres
nourriture de l'herbe
pour la voix perdue de l’aïeul
le cri de mon enfant
que d’appels au départ
toujours repris ! toujours semblables !
ne crois pas que les vents bégaient
et non plus ne tiens
l’air et l’étincelle
comme une pierre tombale
sur tes mains
au musée d’Orsay on peut voir
deux toiles de Courbet
il y a l’Atelier du Peintre
il y a Un Enterrement à Ornans
ce sont deux œuvres immenses
où dominent le marron et le noir
sur la toile dans l’Atelier
une toile contient le monde dehors
dans l’Enterrement la foule des hommes
au bord du trou s’attroupe et prie
et la toile et le trou sont pareils
aspirateurs de la vie
on en a le souffle coupé
on se tient devant deux tombes verticales
l’âme se dilate
avale la lumière
la mort dévale
on s’en va
une ligne à peine noire.
bleu de la nuit
bleu de la montagne
qu’une ligne à peine noire
qui sépare
la matière de l’une
de
la matière de l’autre
qu’une ligne
entre espace et roche
que le regard suit
qu’il l’oublie !
et l’on escaladera le ciel
et la nuit pèsera plus lourd
immense tombe sur nos âmes
on mourra fou
on mourra fou
on ne tiendra pas
si on oublie le regard
si le regard nous oublie