voici les boeufs qui ont dormi
tout le saint jour dedans la boue
et qui se lèvent maintenant
marchant vers l'ouest -
le cahier blanc
Aurélien Delsaux
voici les boeufs qui ont dormi
tout le saint jour dedans la boue
et qui se lèvent maintenant
marchant vers l'ouest -
je ne veux pas être consolé
je veux être réjoui
" "Quand tu as trente gamins dont tu dois t'occuper, avec des niveaux différents, des vécus différents, et qu'il faut que ça roule, lui-disait-elle, trente gamins différents, qui t'arrivent d'horizons différents et qui apprennent de trente manières différentes, il faut le gérer, tout ça. ça implique beaucoup de paperasse. Beaucoup de tout. Mais c'est rien, comparé à ce que je fais ici. Bien sûr, même ici, même dans la section de rééducation à la lecture, il y a des jours où je pense "aujourd'hui, j'ai été bonne", mais le plus souvent j'ai envie de sauter par la fenêtre. Je me casse la tête à me demander si c'est vraiment la bonne filière pour moi. Parce que je m'investis beaucoup, au cas où tu ne t'en serais pas aperçu. je veux faire les choses "comme il faut", et c'est une vue de l'esprit - chaque enfant est différent, chaque enfant est un cas désespéré, et je suis censée arriver pour tout arranger.Bien sûr que tout le monde perd pied avec les enfants qui n'arrivent pas à apprendre. Qu'est-ce que tu veux faire d'un gosse qui sait pas lire? Penses-y - un gosse qui sait pas lire. C'est difficile, papa. Ton ego s'y laisse bouffer, quand même, tu sais." "
Philip ROTH, la Tache, I : "De notoriété publique", 2000.
"Plus tard, j'ai compris que les Russes, dont la vie est morne et misérable, trouvent dans leurs chagrins une distraction. Comme des enfants, ils jouent avec leurs malheurs dont ils n'éprouvent aucune honte.
Dans la monotonie de la vie quotidienne, le malheur lui-même est une fête et l'incendie un divertissement. Sur un visage insignifiant, même une égratignure semble un ornement."
Maxime GORKI, Enfance, fin du chapitre X, 1914.
Il faudrait recopier ici tout le premier chapitre, l'enterrement du père. Et toutes les pages où se révèle la bonté de la grand-mère, qui m'ont ébloui, me rappelant les cinquante premières pages des Misérables, la description de Mgr Myriel. Ecrire la bonté sans miévrerie est difficile. Mais quelle lumière et quelle paix quand c'est réussi.
Par le petit garçon qui marche avec sa mère
Tandis que des enfants s’abrutissent les nerfs
Par les congés conquis par le Front Populaire
Et par la foule immense immergée dans l’Histoire
Pour qu’un coin de ciel bleu déchire la nuit noire
Je te salue, ma rue
Par les slogans gueulés, par les murs qu’on a peints
Les affiches collées jusqu’au petit matin
Par tous les poings levés et par les coups - de main
Par le camp des gitans qu’on voit devenir miettes
Les promesses trahies promettant nos défaites
Je te salue, ma rue
Par la putain qui pleur’ au fond d’un’ camionnette
Le paysan pendu sur son grand champ de dettes
Par les chiens qui aboient quand l’étranger s’arrête
Par la caissièr’ fourbue que tous ont insultée
Par le fils dont le pèr’ vient de se fair’ virer
Je te salue, ma rue
Par la manif en marche, par la foule qui tonne
Sous les coups de matraqu’ dès que la charge sonne
Par le cri de Gavroche et le mot de Cambronne
Par le peuple debout et par nos peurs domptées
Les lendemains promis où d’autres vont chanter
Je te salue, ma rue
Par les deux chants du coq quand la nuit disparaît
Par tous ceux qui croiront au vieux rêve français
Par le blanc des lilas, le rouge des œillets
Par l’étendard sanglant élevé dans l’Histoire
Pour qu’enfin le ciel bleu défasse la nuit noire
Je te salue, ma rue