entendez la chanson blessée
du trop-aimé du trop-aimant
qui pleure à toute heure passée
qui rit en son déguisement
*
par quelle plaie se fend mon coeur
qui porta l'arme qui le tue
quelle saison pour le bonheur
où meurt son rythme ma vertu
*
à l'horizon le ciel est clair
la neige a fondu dans la combe
odeur de pluie de bois de terre
les lézards s'aiment sur les tombes
terre épaisse au passé des neiges
lourde lumière sur les marbres
pesant amour qui tout agrège
fleuve de sève au coeur de l'arbre
c'est trop d'amour mon âme est pleine
de trop de vie mon coeur trop lourd
chants neufs de la verte semaine
tout ce qui naîtra me rend sourd
*
un oiseau bleu passe dans moi
qui crève ma chair et ma fièvre
trou guérisseur gouffre des joies
où ma tristesse met ses lièvres
bienheureuse blessure fine
par où le sang pourra chanter
source folle au flanc des collines
spectre fou des maisons hantées
*
entendez la chanson blessée
du trop-aimé du trop-aimant
son coeur épais le fait boiter
son coeur troué le fait chantant